Anne et Patrick Poirier: La Fabrique de la Mémoire

28 Mars - 3 Mai 2008 Galerie
Vues de l'exposition
Communiqué de presse

Le caractère multiforme de leur travail composé d'herbiers, de dessins, de carnets de notes, de photographies et de maquettes, apparaît pour la première fois dans l'oeuvre Ostia Antica (1969) suite à leur séjour à la Villa Médicis et notamment à la découverte de l'ancien port de Rome. C'est à travers la réalisation d'une maquette du site archéologique que les artistes parviennent à exprimer le plus clairement la problématique de leur démarche artistique.

« Ce qui m'intéressait aussi c'était de découvrir le côté architectural, comment les choses s'organisaient entre elles, comment on construisait un théâtre, un temple, pourquoi tant de colonnes, [...] nous étions arrivés véritablement à créer un archétype. A partir d'Ostia nous nous sommes intéressés à la ville comme cerveau [...] car cela n'est pas uniquement mécanique mais c'est complètement mental.[1] »

Cette recherche devient l'axe fondamental d'oeuvres importantes qui suivent, telles Domus Aurea (1976-1977), Jupiter et les Géants - Paysages Foudroyés (1982-83), Mnémosyne (1990-1991).

Depuis les années 2000, leur exploration de la mémoire ne se concentre plus uniquement sur l'archéologie mais se matérialise aussi dans des installations architecturales plus conceptuelles. Dans l'Ame du voyageur endormi (2002), la Casa Memoria (2005) et le Fabbrica della Memoria (2006), le visiteur entre dans des dispositifs qui schématisent l'organisation de la mémoire. Par des inscriptions dans des cases, écrites sur des murs ou au sol, les mécanismes de la mémoire sont identifiés et classés afin d'en comprendre le fonctionnement. Qu'il s'agisse d'une volière en forme de cône géant, d'un espace ovale compartimenté ou d'un pavillon en béton dans un parc, ces oeuvres récentes manifestent une réflexion psychanalytique plus marquée.

Pour leur nouvelle exposition à la JGM. Galerie, Anne et Patrick Poirier présentent une installation spectaculaire qui prolonge leurs recherches plus récentes. Il s'agit d'un pavillon entièrement bâti de miroirs qui comportent des inscriptions évoquant les « mécanismes » de la mémoire. En y pénétrant, le visiteur voit son image et les inscriptions se superposer et se démultiplier à l'infini. La Fabrique de la Mémoire agit ainsi comme une hétérotopie, comme un « lieu hors de tout lieu[2] » pour reprendre Michel Foucault. Un lieu qui de l'extérieur est le reflet de ce qui l'entoure mais qui à l'intérieur est un abyme où l'on est confronté à l'infini complexité de la compréhension de soi.



[1] « Anne et Patrick Poirier » in Paris-Art, propos recueillis par Audrey Norcia, 2006

[2] Michel Foucault, Dits et écrits 1984 , Des espaces autres (conférence au Cercle d'études architecturales, 14 mars 1967), in Architecture, Mouvement, Continuité, n°5, octobre 1984, pp. 46-49.